Le président sortant et réélu, Evo Morales, avait été contraint à l’exil alors que ses partisans continuent de manifester
Le président bolivien sortant, Evo Morales, est toujours au Mexique, où le gouvernement de ce pays lui a proposé de trouver asile. Lors de l’élection présidentielle du 20 octobre, où il se présentait en vue d’obtenir un quatrième mandat, il avait obtenu 47,1% des suffrages, plus de dix points devant son principal concurrent, Carlos Mesa (droite).
Ce résultat devait, selon la loi, assurer sa réélection dès le premier tour. Mais l’opposition a immédiatement accusé les autorités de fraude, s’appuyant sur un retard de centralisation des résultats. L’Organisation des Etats américains (OEA) a instantanément emboîté le pas. L’OEA a son siège à Washington ; elle compte dans ses rangs une majorité de dirigeants favorables à l’Oncle Sam, et très hostiles aux gouvernements de Cuba et du Venezuela. L’organisation avait par exemple été très active dans les tentatives – vaines – de faire tomber le président de ce dernier pays, Nicolas Maduro.
Quelques jours après le scrutin du 20 octobre et sous pression, Evo Morales a finalement accepté la tenue d’un second tour. Mais pour l’opposition, cette solution de compromis était insuffisante. Elle a contraint M. Morales à la démission après que des secteurs de la police et de l’armée eurent choisi leur camp en décidant de ne plus obéir au pouvoir légitime.
La deuxième vice-présidente du Sénat Jeanine Anez (mouvement social-démocrate, droite) s’est alors proclamée présidente par intérim, et a prêté serment, bible en main (alors que la constitution bolivienne est explicitement laïque). Les partisans d’Evo Morales, qui continuent à manifester contre ce coup d’Etat de fait, sont durement réprimés, avec notamment près d’une trentaine de protestataires qui ont perdu la vie.
Premières mesures
Parmi les premières mesures, Mme Anez a changé le chef de l’armée, lancé des poursuites contre Evo Morales, annoncé vouloir quitter l’Alliance bolivarienne pour les Amériques, et renvoyé sans délai 700 membres de la mission de coopération médicale cubaine.
Très logiquement, elle a également reconnu Juan Guaido, le dirigeant de l’opposition vénézuélienne qui s’était autoproclamé président de ce pays en janvier 2019. Rappelons que M. Guaido avait été très vite reconnu par les Etats-Unis, par l’europarlement, et par les principaux pays de l’UE, dont l’Allemagne et la France. Début février, Nathalie Loiseau, le ministre français des Affaires européennes, déclarait ainsi : « nous considérerons Juan Guaido comme le président légitime du Venezuela ».
Dans ce contexte, l’actuelle titulaire de ce portefeuille, Amélie de Montchalin, a « appelé au calme et à la retenue ». Dans une intervention a l’Assemblée nationale, le ministre a également martelé, manifestement à l’attention des partisans du président chassé : « nous n’acceptons en rien les manifestations violentes, nous cherchons à protéger la démocratie dans un pays où des élections doivent se tenir ».
Mme de Montchalin a conclu en appelant de ses vœux un tel processus, et précisé que « l’Union européenne enverra des experts sur le terrain, bien évidemment ».
« Bien évidemment ». On ne saurait mieux dire.