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Bruxelles compte démarrer les négociations avec Londres par… une demande de rançon de 100 milliards d’euros

méthodes maffieuses

Les Vingt-sept font monter les enchères quant à la somme qui sera exigée du Royaume-Uni avant que ce dernier sorte effectivement de l’UE.

Les négociations entre Bruxelles et Londres en vue du Brexit doivent s’engager peu après les élections britanniques anticipées prévues le 8 juin (lire Ruptures du 26/04/17). Les Vingt-sept entendent être « fermes » et « durs » vis-à-vis des Anglais. Ils mettent en avant trois exigences prioritaires : le statut des expatriés, la gestion de la future frontière entre la République d’Irlande et l’Irlande du Nord britannique, et la question de l’ardoise que l’UE entend faire payer aux Anglais, qui ont eu le toupet de choisir la sortie du club…

Jusqu’à présent, les estimations des sommes exigées du Royaume-Uni tournaient autour de 60 milliards d’euros – une paille ! Mais dans son édition datée du 3 mai, le Financial Times a refait les comptes, en incluant les différentes demandes des Etats membres. Le quotidien financier chiffre entre… 91 et 113 milliards d’euros le montant de l’addition. Pour sa part, le « think tank » bruxellois Bruegel avance une fourchette de 82 à 109 milliards.

Montant réclamé à Londres

Il s’agit du montant forfaitaire brut qui serait réclamé à Londres, compte tenu des engagements, garanties et programmes en cours auxquels avait souscrit le Royaume-Uni. Rentrent également en ligne de compte les retraites des fonctionnaires européens. Cette réévaluation est issue des demandes que formulent les différentes capitales. Dernières surenchères en date : Paris et Varsovie voudraient que soient intégrée dans les calculs la contribution que le Royaume-Uni aurait due au titre de la politique agricole commune s’il n’y avait pas eu le Brexit… Athènes exige pour sa part que les Anglais continuent à payer les « aides » à la Turquie, conformément à l’accord qui prévoit qu’Ankara retienne les migrants sur son sol.

Un des enjeux des négociations va donc se concentrer sur la méthodologie permettant d’aboutir à un chiffrage : que prendre en compte, quels engagements, sur quelles périodes ? Quels remboursements ultérieurs pour les prêts consentis par l’UE à des entités tierces quand ceux-ci seront soldés ? Etant entendu que la programmation budgétaire de l’UE est pluriannuelle et couvre actuellement la période 2014-2020. A l’inverse, le Royaume-Uni peut faire valoir qu’il est copropriétaire d’actifs (par exemple immobiliers) européens, et exiger une rétrocession au prorata.

L’immense complexité technique laisse une très large marge de manœuvre aux Vingt-sept pour faire monter les enchères

Tout cela est évidemment d’une immense complexité technique, ce qui laisse une très large marge de manœuvre aux Vingt-sept pour faire monter les enchères. Mais le Premier ministre, Theresa May, a prévenu qu’elle entendait négocier pied à pied. Car en réalité, la dimension monétaire n’est pas technique, mais bien politique. D’une part, les Vingt-sept doivent bien constater que les sommes que Londres ne paiera plus après le Brexit devront être compensées par une hausse des contribution des autres – une perspective peu réjouissante au moment où l’intégration européenne est plus impopulaire que jamais.

Il s’agit de signifier aux peuples tentés par une sortie de l’UE que celle-ci aurait un coût immense

D’autre part et surtout, il s’agit de signifier aux peuples tentés par une sortie de l’UE que celle-ci aurait un coût immense. Pour certains dirigeants européens, cette volonté d’intimidation – d’aucuns disent également de vengeance – est ouvertement assumée. Mais à trop tirer sur la corde, celle-ci pourrait bien casser : si les négociations sont rompues, la Grande-Bretagne n’obtiendra certes pas l’accord commercial ambitieux qu’elle souhaite conclure avec Bruxelles. Mais elle sera libérée de tout engagement.

Méthodes de la mafia

Reste que réclamer de Londres 100 milliards d’euros avant de pouvoir sortir de l’Union s’apparente à une exigence de rançon, comme l’a noté le chef du UKIP à l’europarlement. Des « méthodes proprement mafieuses », a même dénoncé Nigel Farage.

Sauf qu’en l’espèce, l’oligarchie bruxelloise, à l’inverse de Cosa Nostra, ne pourra guère compter sur l’Omerta – la loi du silence…

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