Trois citations édifiantes en trois jours ! Que demande le peuple ? Eh bien, postulons qu’il souhaite en prendre connaissance.
Qu’ont en commun le président de la commission Europe du Medef, le président de la commission du Renseignement du Sénat américain et le président du Conseil européen (à part le fait d’être président de quelque chose) ? Réponse : ils ont tous les trois fourni récemment des déclarations savoureuses.
Les voici :
« Je vais voter Macron, parce que je pense qu’il faut faire le pari de la jeunesse, du renouveau. »
Loïc Armand (65 ans), président de la commission Europe du Medef et de L’Oréal France, lors d’un débat organisé par EurActiv à Bruxelles, le 28 mars 2017.
On le voit, les arguments sont de poids. Mais ne soyons pas injustes, Loïc Armand peut développer et entrer dans le débat de fond : « Macron est profondément européen. Il a compris que l’Europe, c’est une communauté de gens, d’hommes et de femmes, qui bâtissent ensemble quelque chose. Ce n’est pas une Europe française, ce n’est pas une Europe allemande, ce n’est pas une Europe franco-Allemande, c’est une Europe européenne. C’est-à-dire, si on veut faire des choses ensemble, il faut s’écouter, il faut se respecter, décider de faire quelque chose ensemble et le faire ensemble. Ça, je pense que Macron l’a profondément dans l’esprit et dans le cœur ».
L’européisme, ici à la sauce patronale, ne serait-il pas un peu « New Age » ?… Après tout un commissaire européen donne ouvertement dans le chamanisme et le mysticisme.
Dans le compte rendu du débat qu’il a organisé, le site EurActiv précise : « Bruxelles applaudit Macron dès qu’il prononce le mot Europe. » Ainsi, contrairement à ce que les esprits cyniques et blasés peuvent penser, il est facile de rendre un européiste heureux. Un mot suffit.
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« Je pense qu’il est raisonnable de dire, d’après ce que tout le monde estime, que les Russes sont activement impliqués dans les élections françaises. »
Richard Burr, président de la commission du Renseignement du Sénat américain, lors d’une conférence de presse à Washington, le 29 mars 2017.
Donc, « d’après ce que tout le monde estime », Moscou manipule l’élection présidentielle française. Si avec ça les sceptiques qui attendaient une preuve des allégations quotidiennes sur les manœuvres russes ne sont pas satisfaits…
Le sénateur Burr dirige la commission chargée d’enquêter sur l’ingérence supposée de la Russie dans la présidentielle américaine. Une enquête parfaitement inutile car, d’après ce que tout le monde estime, la culpabilité de Moscou est d’ores et déjà établie.
La « post-vérité », c’est généralement celui qui dit qui y est.
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« Pour les patriotes rationnels et responsables qui veulent maintenir la souveraineté et l’indépendance de leurs nations et de leurs États, il n’y a pas d’alternative à une Europe unie et souveraine. »
Donald Tusk, président du Conseil européen, dans son discours lors du congrès du Parti populaire européen (PPE) à Malte, le 30 mars 2017.
Nous avons vu précédemment que M. Tusk n’en est pas à son premier discours fabuleux. Il s’est de nouveau surpassé. Selon le président du Conseil européen, le plus sûr moyen de préserver son indépendance et sa souveraineté c’est… de les abandonner. Et cette assertion novlanguesque serait non seulement « responsable » mais aussi « rationnelle » ?
La Pologne a produit de grands logiciens, comme Jan Łukasiewicz et Alfred Tarski ; leurs contributions à cette « science du raisonnement correct » – entre philosophie et mathématiques – sont reconnues par les spécialistes comme de première importance. Par conséquent nous invitons M. Tusk à s’intéresser aux travaux de ses compatriotes.
Si le binôme de Jean-Claude Juncker considère (à tort) dans une envolée thatchérienne qu’ « il n’y a pas d’alternative à une Europe unie et souveraine » – c’est-à-dire aux États-Unis d’Europe –, il y a bel et bien une alternative à l’irrationalité.
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À bientôt pour de nouvelles citations mirifiques. La production des euro-atlantistes est pléthorique dans le domaine.
Laurent Dauré